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Historique

 

 

Le saviez-vous ?

Séries d'anecdotes sur le jeu d'échecs et les joueurs

A

 

 

 

Une partie d'Alekhine contre un officier nazi

Voici la position initiale

J'abandonne, dit l'officier, je ne peux pas me défendre du mat en h8. Si je joue 1. ...g6 suivra 2. Dh7+ Rf8; 3. Dh8+! Fxh8; 4. Txh8 mat - C'est bien, dit Alekhine, je vais jouer avec vos pièces noires. Et il commence à jouer : 1. ...Th4;

Les personnes présentes susurraient à l'oreille du Général de prendre la tour avec le Cavalier et non avec la Tour.

- Comme si je ne voyais pas qu'il me donnera le mat si je prends avec la Tour! Après 1. ...Th4; 2. Cxh4 Dc3, le nazi reste pensif puis de nouveau abandonne, indiquant que 3. Rc1, Da1+; 4. Rd2 Dxh1 et le Cavalier est perdu... - Vous vous trompez, dit Alekhine, donnez-moi à nouveau les Blancs... Et l'Allemand joua 1...Th4 et Alekhine contesta 2.Ch4, Dc3; 3.Dh8+!!, Rxh8; 4.Cg6+ double , Rg8; 5.Th8 mat.

Alexander Alekhine donna de nombreuses simultanées à travers le monde. Dans l'une d'elles, Alekhine arrive devant l'un des échiquiers et voit son adversaire ravi lui annoncer triomphalement : - Maître, vous êtes mat en trois coups ! À quoi répondit le tranquille Alekhine : -Vous avez raison, mais ne vous enthousiasmez pas. C'est à mon tour de jouer et je vous fais mat en deux coups !

Alekhine était tellement absorbé par les Échecs, rapporte un de ses camarades de Lycée, que durant les classes, il pouvait se déconnecter complètement et ne plus savoir où il se trouvait. Au cours d'un exercice d'algèbre, il leva soudain la tête, regardant autour de lui les yeux brillants et écartant une mèche d'un geste qui lui était familier. - Bien, Alekhine, Avez-vous trouvé le résultat? - Oui... je sacrifie le cavalier et les Blancs gagnent! La classe, comme vous pouvez l'imaginer, éclata de rire.

Alekhine se rendait en train à un tournoi, partageant son wagon avec deux belles dames. Bientôt, notre Alekhine entame sa cour, vantant tout à tour le charme des deux délicieuses voyageuses, mais sans se montrer concrètement plus intéressé à l'une qu'à l'autre. En fait, jouant sur les deux échiquiers !

Le train arrive à destination. Le trio se sépare. Une des dames qui avait reconnu Alekhine s'approche et lui glisse à l'oreille : — Aux Échecs, vous serez un champion, Dr Alekhine, mais avec les « Dames », vous êtes à peine un débutant!

Le génial Alekhine était bien connu pour sa soif de victoire. Il détestait perdre, mais quel joueur d'Échecs aime perdre, et tous les moyens lui étaient bons pour triompher, quel que soit le chemin qui le conduisait au gain. Durant le match de revanche pour le Championnat du Monde contre le hollandais Max Euwe, sachant que son adversaire détestait les chats, Alekhine joua une des parties avec un de ses chats sur les genoux, qu'il caressait ostensiblement de temps en temps. Alekhine savait qu'il n'existait aucune règle à ce sujet et que Euwe ne pouvait déposer aucune plainte.

En 1919, Alexander Alekhine travaillait dans un studio de cinéma en URSS. Un homme entre dans le hall et demande à voir quelqu'un du département de l'éducation. — Je suis à l'écoute, M. Poluektov, déclare Alekhine. — Nous nous connaissons ? s'étonne le visiteur. — Il y a quatre mois, sourit Alekhine, dans la pharmacie Ferrein, vous avez commandé des médicaments prescrits par le Dr Anna Zasedatelev pour votre fille de 6 ans qui avait un mal de gorge. J'étais dans la file d'attente et j'ai entendu votre conversation avec le pharmacien. Poluektov resta là, bouche bée. — Vous aviez alors un pince-nez, a poursuivi Alekhine. Vous avez sorti un porte-monnaie gris en peau de crocodile de la poche gauche de votre veste et puis... Mais Alekhine ne finit jamais sa phrase. Le visiteur effrayé s'enfuit et ne revint jamais.

Un an plus tard, Alekhine utilisa sa mémoire phénoménale dans une autre institution, il travaillait alors au département d'enquête criminelle centrale. Alekhine surprit une conversation entre un homme arrêté et l'officier de service. Le suspect s'identifie comme Ivan Tikhonovich Bodrov. — Pouvez-vous, s'il vous plaît, répéter votre nom de famille ?, interrompt Alekhine. — Bodrov. Et alors ? — Vous n'êtes pas Bodrov, vous êtes Orlov, déclare Alekhine. Et votre prénom est Ivan Timofeevich et non Ivan Tikhonovich. N'essaye pas de me bluffer, mon gars ! Ne me prends pas pour un idiot ! Il y a quelques années, quand je t'ai rencontré dans un bureau d'enregistrement de l'armée, tu t'es présenté comme Ivan Orlov Timofeevich. Tu portais un crucifix doré sur une chaîne en métal blanc et fin autour du cou, et un petit pendentif en forme de taupe sous le crucifix. Le condamné est rigide, lorsque l'officier de service déboutonne sa chemise. Tout le monde peut voir la taupe et le crucifix. Plus tard l'enquête confirma que cet homme était bel et bien Orlov, un récidiviste qui fut incarcéré.

 

 

Alapin

 

Dus-Chotimirsky

Cette position survint dans la partie entre Dus-Chotimirsky et Alapin au tournoi de Prague en 1908. Alapin était connu pour sa tendance à plaisanter durant le jeu. Alapin avec les Noirs est dans une confortable situation puisque les Blancs ne peuvent éviter le couronnement du pion d. Alapine continue tranquillement avec 73. ...d2 et commente moqueur :

- La fin s'approche !

La partie continue 74. Tf5+ Rc4 75. Tf4+ Rc3 76. Txa4 d1=D 77. Ta5

Se voyant perdu, Dus-Chotimirsky dit malicieusement à son rival : - Il est temps pour moi d'abandonner ! Eh, vous seriez encore bien capable de me croquer aussi le pion ! Alapin regarde Dus-Chotimirsky soupçonneux et réfléchit pendant dix minutes pour enfin répondre : - Mais oui, mon cher petit Monsieur, ce petit pion, je vais me le manger ! Et il joue 77. ... Dxf3 ?? ne voyant pas la réponse pourtant évidente 77. Ta3 gagnant la Dame et la partie. Prenant conscience de son erreur, Alapin gesticula, cria, pâlit... et se tut définitivement.

 

B

Bogoliubov

Bernstein

 

Le Grand Maître Efim Bogoliubov avait quelque peu grossi. Ossip Bernstein, un joueur français important d'origine ukrainienne et qui ne l'avait pas vu depuis un certain temps, lui dit : «Comment tu as changé, Collègue! Tu ressembles maintenant à un véritable pion doublé».

 

Le Grand Maître Efim Bogoliubov était connu pour son humour parfois quelque peu de mauvais goût. Cet incident survint après une partie contre le Docteur Tarrasch dont il sorti vainqueur. Quelques jours plus tard, Tarrasch meurt. Bogoliubov publiant sa partie, ne trouve d'autre titre que : « La partie qui tua le Dr Tarrasch ».

Né au temps de la Russie impériale dans une famille juive, Ossip Bernstein grandit dans le climat anti-juif de la Russie pré-révolutionnaire. Docteur en droit de l’université d’Heidelberg en 1906, il devint avocat spécialisé en questions financières. En 1918, il est arreté à Odessa par la Tchéka et condamné à être fusillé. Le peloton d’exécution est aligné, l’officier vérifie la liste des détenus et, en voyant le nom de Bernstein, demande s’il est bien le Grand Maître International. Bernstein répond par l’affirmative mais l’agent sceptique lui propose une partie. S’il perd ou fait partie nulle, il sera abattu. Bernstein remporte le match avec aisance. Ayant littéralement gagné sa liberté, il prend rapidement la fuite sur un navire britannique, et s’installe à Paris.

David Bronstein était réputé pour le temps qu'il consacrait à réaliser son premier coup (son record fut de quarante minutes !) et trop souvent, les journalistes lui demandaient la raison d'un tel délai. Bronstein, lassé de leur sempiternelle question, répondit un jour : - Je pense à comment je vais jouer demain ! L'explication de ce comportement nous est donnée par Yuri Averbach: Bronstein avait beaucoup de mal à contrôler sa nervosité au moment de choisir un plan pour commencer le jeu. La pendule se mettait à courir et David restait pétrifié, cherchant à se tranquilliser et à se concentrer sur la partie.

Un des personnages le plus curieux de l'histoire de notre jeu est, sans doute, Joseph Henry Blackburne (1841-1924). Homme de caractère fort et changeant, passant de l'irritation à la dépression très facilement, acteur d'une série d'anecdotes qui lui valut le surnom de "La Peste Noire"! Pour en avoir une idée, il suffit de dire que, après avoir perdu un match contre Steinitz, il s'est jeté par la fenêtre par désespoir d'avoir perdu. La bonnes nouvelle était que l'on était au rez de chaussée, l'événement n'eut donc pas des conséquences funestes. Une autre anecdote afin d'évaluer l'autre extrémité de sa personnalité mercurielle :au cours d'une similtanée donnée à l'Université de Cambridge, les étudiants ont pensé qu'il serait plus facile à battre en laissant une bouteille de whisky et un verre à chaque extrémité de la table. A la fin de la session, Blackburne avait bu deux bouteilles et a remporté tous les matchs en un temps record. Une autre anecdote, probablement apocryphe, raconte que dans une simultané, concentré et nerveux, il boit le verre de whisky de l'un des participants. Après le match il déclare que son adversaire lui ayant mangé un pion "en passant" et que, incidemment, il avait, lui, bu son whisky "en passant". Toujours il a soutenu la théorie selon laquelle boire du whisky améliorait la qualité de jeu parce que "l'alcool éclairci l'esprit." Fidèle à ses idées, toute sa vie il a tenté de prouver cette théorie toutes les fois que il le pouvait par des "cuites" sévères, qui furent nombreuses durant ses 83 années de vie.

Abraham Baratz, joueur d'échecs et sculpteur d'origine roumaine installé en France en 1924, celui la même qui sculpta le monument funéraire d'Alekhine, rend visite, peu avant la seconde guerre, au Maître Koltanovski et lui demanda s'il voulait poser pour faire son buste. Koltanovski, flatté, accepta. Quelque temps plus tard, ils se rencontrent et Koltanovski demande des nouvelles de son buste. "Je l'ai déjà vendu", annonce Baratz satisfait. Très flatté à nouveau et intrigué, le Maître questionna : - Mais qui peut bien s'intéresser à moi ? - Personne, répond Baratz malicieusement, mais je vous ai fait passer pour Alekhine !

C

Capablanca, comme il le recommanda à son fils, ne buvait ni ne fumait, mais c'était un noctambule, aimant la bonne compagnie, féminine en particulier. Il a été considéré comme l'un des hommes les plus sexy du monde, avec des stars de cinéma comme Rudolph Valentino. Il a justifié la plupart de ses défaites avec l'excuse qu'il avait été absorbée par une femme. Quand il perdit contre Tarrasch à Saint-Pétersbourg, en 1914, on a supposé qu'il était passé directement du lit de l'épouse du grand-duc à l'échiquier. La faute de sa défaite contre Alekhine en 1927 revient à de trop nombreuses et jolies ballerines avec lesquelles il s'était diverti.

Capablanca était connu tant pour ses victoires échiquéennes que celles sur l'oreiller et aussi pour ses coups de canif à son contrat de mariage. Au cours du tournoi de Karlsbad de 1929, fier d'une nouvelle conquête, il arrive au tournoi avec la jeune femme, l'invitant à assister à la partie. Malheureusement pour notre Don Juan cubain, son épouse voulant lui faire une petite surprise débarque tout droit d'Amérique! Apercevant sa régulière notre chaud latin se trouble, gaffe au neuvième coup, perd une pièce puis la partie contre Saemisch! Moralité : les femmes ou les Échecs, il faut choisir!

A l'occasion du match Tchigorine - Steinitz, disputé dans la capitale cubaine, Capablanca, encore un enfant de quatre ans, laissa pantois plusieurs forts grands joueurs cubains en leur montrant, avec tous les détails, une variante qui avait échappé à Steinitz et qui lui aurait permis de remporter la victoire.

Pendant la Première Guerre Mondiale, Capablanca résida aux État Unis, jouant et échangeant des courriers avec le champion du monde Lasker, citoyen allemand et patriote. Un jour de 1918, deux discrets gentlemen de Washington vinrent le visiter. C'étaient deux agents du contre-espionnage qui enquêtaient sur sa correspondance avec l'étranger, remplie de symboles étranges : 10 Fxe7 Dxe7 11 O-O Cxc3 12 Txc3 e5. - Qu'elle est cette clef?, demandèrent les agents. Très sérieusement, Capablanca répondit : - Ce sont des symboles pour une manœuvre de libération! - Comment cela?, s'inquiétèrent les agents à l'unisson. Capablanca éclata de rire et après de longues explications les policiers comprirent, rassurés : - Ah, c'est comme les Dames!; - Effectivement, comme les dames mais avec des cavaliers. Notre cubain se rendit alors compte qu'il n'y avait peut-être pas tant que cela d'intelligence dans l'Intelligence Service américain!

Au tournoi international de New-York en 1927, Capablanca était déjà vainqueur, bien des rondes avant la fin. Devant un reproche ironique d'un de ses collègues, Capablanca lui dit que son intention était de faire nul dans toutes les parties restantes. Arriva le moment de jouer contre Nimzovitch et, à peine l'ouverture terminée, notre génial Cubain envoie à son rival ce message par l'intermédiaire de l'arbitre : "Je vous en prie, cessez de jouer si mal sinon je n'aurai d'autre solution que de gagner!"

Olga, sa veuve, relate sa première rencontre. En 1934, traînée par sa sœur, elle se rend à une réception à l'Ambassade cubaine de New-York. Une fois là, elle demande ingénument, dévisageant les invités : "Où est Capablanca?" La réponse ne pouvait-être plus explicite : "Ne te préoccupe pas. Quand il entrera dans le salon, tu le reconnaîtra immédiatement." Olga précisait encore : "Ce n'es pas que Capa se comportait comme un roi, c'était un roi!"

Peu de temps après sa défaite contre Alekhine, Capablanca passait apparemment beaucoup de son temps dans un café parisien. Ses amis et connaissances y venaient souvent le voir et jouer quelques parties contre l'ex mais toujours charismatique champion du monde. Un matin, alors que Capablanca prenait son café, lisant paisiblement son journal, un étranger, apercevant l'échiquier qui trônait en bonne place sur la table, s'arrêta et lui proposa une partie. Toujours heureux de jouer, Capa plie son journal, s'approche de l'échiquier et prend sa Dame qu'il met négligemment dans sa poche. Son futur adversaire, qui apparemment n'avait nulle idée de qui était vraiment Capablanca réagi avec colère.
Hé ! Mais vous ne me connaissez pas ! Il est bien possible que je vous batte !
Monsieur, dit Capablanca souriant gentiment, si vous pouviez me battre, je vous connaîtrais !

Cette petite anecdote est contée par Heinrich Fraenkel :

« Je me souviens d'avoir vu de nombreuses fois Capablanca au tournoi de Margate en 1935 et à une occasion, je fis cette expérience quelque peu embarrassante de voir un petit peu moins d'une centaine de personnes se pressant autour de ma table, tous le dos tourné à mon échiquier. Et je ne pouvais guère les blâmer, car à trois mètres de là, à l'échiquier suivant, Capablanca jouait contre Reshevsky. J'aurais, moi aussi, préféré regarder leur partie plutôt que de jouer la mienne !

La popularité de Capablanca auprès de ses fans était immense. Au cours d'un tournoi, je parlais à Sir George Thomas quand un petit garçon lui tendit son carnet d'autographes, que Sir George gentiment signa. Le garçon me tend alors le carnet et je m'étonne : — Mon garçon, tu n'as aucune raison de me demander un autographe. — Oh si, monsieur !, s'entête-t-il. — Mais pourquoi diable ? Cela ne vaut rien pour ta collection ! — Je vous ai vu parler à Capablanca !, s'exclame alors le gamin rayonnant. »

 

D

A la mort de Philidor en 1795, c’est Alexandre Deschapelles (1780-1847) qui devint le joueur le plus redoutable. Soldat des armées révolutionnaires et impériales, laissé pour mort au siège de Mayence, participant à la bataille de Fleurus, capturé à Baylen, évadé, il perdit sa main droite au combat et fut marqué d’une profonde balafre au visage, creusée par un sabre. Il se distingua par une aisance exceptionnelle dans la plupart des jeux puisque seulement quelques mois après avoir appris les règles du jeu de dames, il bâtit le champion de France. Il fut également remarquable au billard (avec son seul bras gauche). Sa nomination par le maréchal Ney en 1812 comme superintendant du monopole du tabac à Strasbourg ne le dissuada pas des échecs. Après la bataille de Waterloo, où il organisa une bande de partisans qui le nommèrent général, il revint au Café de la Régence afin de vivre du jeu d’échecs. Bientôt Deschapelles devient un des joueurs les plus forts du Café de la Régence. Il est réputé jouer des parties où il donne un avantage. S’il perd, il a l’habitude d’augmenter l’avantage et l’enjeu, ce à quoi ses adversaires ne se risquent pas toujours. Il n’est en aucune manière théoricien, ne lit jamais de livres d’échecs et, contrairement à Philidor, n’en a jamais rédigé non plus. Il ne brille pas par sa connaissance des ouvertures, réfléchissant souvent longtemps lors de ses premiers coups. Les parties et le style de Deschapelles symbolisent parfaitement la conception d’alors du jeu d’échecs. L’attaque démarrait dès l’ouverture de la partie, les sacrifices se succédaient afin d’aboutir à une combinaison finale de mat la plus spectaculaire possible. La préparation des attaques était limitée, le sens positionnel réduit, la théorie stratégique absente. Sa domination s’arrêta en avril 1821 après qu’il perdit un match contre un de ses élèves, Louis de la Bourdonnais. Il préféra alors abandonner définitivement le jeu d’échecs pour se consacrer au whist.

F

Un soir, Bobby Fischer, encore jeune et sans le sou, mais déjà champion des United States, passait devant le Chess and Checker Club de New York, où les habitués et les passants viennent jouer pour de l'argent. Col du manteau relevé, chapeau sur les yeux, il se présente incognito à l'entrée. - Psst, Franck ! interpelle-t-il Frank Brady, son ami et futur biographe, qui se trouvait là. - Bobby, qu'est-ce que tu traines par ici ? lui demande Brady surpris. Pris quelque peu au dépourvu par l'échec de son déguisement, Fischer timidement explique. - J'aimerais un peu de tunes pour aller au cinoche. Est-ce que tu peux me trouver une partie ? Brady se retourne et crie à l'intérieur à l'intention de John Fursa, le propriétaire : - Ce mec veut jouer ! Tu peux lui arranger ça ? Jetant un œil au travers de la pièce enfumée, Fursa répond : - Dis-lui que non ! C'est un gamin. Les hustlers d'ici (joueurs d'échecs pour de l'argent et souvent un peu arnaqueurs) vont le bouffer tout cru ! Fischer dépité tourne les talons. Brady révèle alors l'identité du gamin en question et un gémissement universel s'ensuivit. -Oh, mon Dieu ! dit un des joueurs, j'aurais payé des centaines de dollars juste pour m'asseoir en face de l'échiquier de Bobby Fischer...

G

 

En 1953, Édouard Gufeld, dans la tourmente de ses 17 ans, est amoureux de la belle joueuse moscovite Bella dans la fraîcheur, elle aussi, de ses 17 printemps. Ils participent tous deux au Championat Jeune d'URSS par équipe et Gufeld ne peut détacher son regard des magnifiques yeux bleus de Bella. La jeune joueuse ignore tout de la passion d'Édouard et le pauvre enamouré se sent l'être le plus misérable de l'univers.

Édouard, tout au long des parties, n'a d'yeux que pour la délicieuse Moscovite et malgré cette distraction passionnée, il arrive à mener à bien ses parties. Contre Jasidovsky, au 29e coup, Gufeld effectue le sacrifice de sa Tour en h1.

Toute la salle s'amoncelle autour de la table sauf... Bella, qui reste impassible devant son échiquier. Édouard se lève, va vers Bella et lui dit : "Viens ! Ce sacrifice, je l'ai fait pour toi !" La jeune fille se rend à la table de Gufeld, regarde la position puis s'en retourne à son échiquier, mais quelque peut troublée par cette échiquéenne déclaration d'amour, elle effectue un mauvais coup et perd la Dame. Bella, dégoûtée, quitte la salle en pleurant. Édouard, coupable revient à sa partie, offre le nul à son adversaire, qui s'empresse d'accepter et notre amoureux court consoler sa belle Bella. Mais la charmante, rancunière, ne veut pas être consolée et dénonce notre romantique aux arbitres qui l'admonestent et lui interdissent de s'approcher de l'équipe féminine pendant les parties. Gufeld ne revit sa belle que lorsqu'ils s'affrontèrent devant l'échiquier. L'histoire ne dit pas qui fut le vainqueur.

Cependant le grand perdant fut Jasidovsky. Le sacrifice de la Tour, comme les amours d'Édouard, était complètement foireux ! Après 29. ... Th1 30. RxT Dh5+ 31. Rg1 Fxf3 32. Te1 Fxg2 33. Dg3+ Cg4 34. Dh4, les Noirs n'ont plus rien.

 

I

L'Iran est le seul pays où les Échecs sont prohibés. Khomeini  interdit ce jeu car il "affecte la mémoire et peut causer des dommages cérébraux, il contribue à créer une mentalité d'agression et de violence".

K

Karpov, lors d'une interview raconte cette plaisante anecdote sur Najdorf. À cette question du journaliste : - Les artistes sous l'effet de l'alcool peuvent créer des œuvres admirables. En est-il de même aux Échecs ? Karpov qui ne boit, ni ne fume, répond : - Avec de l'alcool dans le corps, on ne peut que jouer plus mal. Échecs et alcool ne vont pas ensemble. Mais aussitôt, Karpov se ravise et souriant raconte l'anecdote : "Cependant, il y a quelque exception. Najdorf, le joueur polonais-argentin qui participait à un long tournoi, aperçut, effondré dans un fauteuil de l'hôtel, son adversaire de l'après-midi. Désirant l'encourager, il l'invite à prendre un verre. Le joueur déprimé accepta enchanté. Après le premier verre vinrent un second, un troisième et bien d'autres tous payés par Don Miguel. Son invité avait ressuscité, mais Najdorf se sentait un peu coupable, pensant que son adversaire bien imbibé jouera bien mal la partie de l'après-midi. Il n'en fut pas ainsi. Le ressuscité, avec de manifestes signes d'ébriété, fit une partie formidable et balaya Najdorf de l'échiquier. Étonnamment peu de temps avant la mise à mort, l'ébrieux adversaire lui propose nul. - Tu me proposes nul ? s'étonne Najdorf, je ne comprends pas, tu as totalement gagné ! - C'est une manière de te remercier pour les verres que tu m'as offerts. Je suis complètement fauché et quand je ne picole pas, je joue comme un goret. C'est seulement après le troisième whisky que je commence à voir clair".

Anatoly Karpov est le premier champion du monde d’échecs à remporter le titre sans jouer une partie. Il l’obtient en 1975 contre Fischer qui refusa de défendre son titre. Dans une interview, Karpov a déclaré (en parlant de Fischer) :

Il a refusé de remettre en jeu son invincibilité. Il a eu peur de jouer et de prendre le risque de perdre. Seuls ceux qui ne jouent pas ne perdent jamais.

 

 Khan Sultan (1905-1966) est, sans doute, la figure la plus mystérieuse de l'histoire des Échecs. C'était le servant hindou analphabète d'un colonel de l'armée britannique. N'oublions pas que nous sommes dans les temps où l'Inde est encore une colonie britannique. Son maître (il faut bien appeler les choses par leur nom), le Colonel Nawab Sir Umar Hayat Khan, se rend compte de son extraordinaire talent pour la version indienne des Échecs et lui apprend les règles européennes et le fait participer au championnat d'Inde de 1928. Sultan Khan gagne l'épreuve avec deux points d'avance ! L'année suivante, il participe au championnat de Grande-Bretagne qu'il remporta trois années consécutives en 1930, 32 et 33. Sultan Khan ne savait ni lire, ni écrire, ne connaissait rien à la théorie et obtint ses résultats par la seule pratique. Pendant les quatre années de sa courte carrière, il affronte les meilleurs joueurs du monde : Alekhine, Capablanca, Rubinstein, Euwe et Tartakover. Cela fut un choc pour la société britannique encore très victorienne et collet monté. Mis à part son origine et sa classe sociale, son physique était des plus curieux : petit, mince, la peau sombre, la goutte au nez car affligé d'un rhume perpétuel. Cependant, son jeu était des plus solides, avec une grande compréhension positionnelle et une patience inébranlable dans les parties longues, mettant en place des manœuvres tenaces qui peu à peu laissaient totalement sans ressources ses adversaires. Illettré, il ne pouvait noter ses parties et avait toujours besoin d'une aide. Après quatre ans en Grande-Bretagne, son maître décida de retourner en Inde. Il y vécut comme agriculteur et mourut en 1966 de tuberculose, laissant derrière lui bien des interrogations, en particulier celle de savoir jusqu'où il aurait pu évoluer s'il avait eu la chance de vivre dans de meilleures conditions.

 

À Linares en 1994, Judith Polgar, 17 ans, participe pour la première fois à ce prestigieux tournoi pour y affronter les joueurs les plus forts du monde. Après quatre rondes, elle obtient déjà 4 points, excellent résultat puisqu'elle à un des plus faibles elo du tournoi (tout de même 2630 !). À la cinquième ronde, elle rencontre Garry Kasparov avec les Blancs.

Au 36e coup, Kasparov lâche son Cavalier sur c5, mais s'apercevant aussitôt que 27. Fc6 gagne la Tour, il reprend son Cavalier, le repose en d7, puis quelques secondes plus tard le jouera en f8 ! À l'exception de Judith, personne ne fut témoin de la tricherie. Judith étonnée cherche des yeux l'arbitre, mais n'ose, de ses petits dix-sept ans, se plaindre. " Je jouais contre le champion du monde, expliqua-t-elle plus tard, et je ne voulais pas causer des désagréments lors de ma première invitation à un événement aussi important. J'avais aussi peur que si ma plainte était rejetée, je sois pénalisée à la pendule alors que nous étions déjà en Zeitnot. " Elle ne savait pas, alors, que l'indélicatesse de Garry Kasparov avait été immortalisée par la télévision espagnole. La vidéo montra que Garry avait lâché son Cavalier pendant un quart de seconde ! Le directeur du tournoi fut critiqué pour ne pas avoir donné le gain à la jeune Judith, quand la preuve lui fut montrée. Judith, plus tard, au bar de l'hôtel, aurait demandé à Kasparov : " Comment as-tu pu me faire ça ? " Kasparov déclara aux journalistes que sa conscience était claire, n'ayant pas eu conscience de lâcher sa pièce ?! Judith quelque peu déprimée par cette attitude ne put gagner qu'un demi-point durant les six rondes suivantes. James Eade commenta : " Si même les champions du monde enfreignent les règles, que peut-on espérer du reste d'entre nous ? " Et bien, justement, ne pas jouer comme des Champions du Monde : jouer mal, mais honnêtement !

L’ukrainien, Sergueï Kariakine, est le plus jeune, toutes périodes confondues, à obtenir son titre de grand maître international d’échecs. Il est suivi de près par Parimarjan Negi et Magnus Carlsen (grands maîtres à 13 ans). Né le 12 janvier 1990, Sergueï obtient son titre de grand maître international à 12 ans et 7 mois ! A côté, Judit Polgar et Bobby Fischer font figure de petits joueurs ; ils ne décrochent leur titre qu’à 15 ans !

L

Lasker, avant d'être champion du monde durant vingt années, était très pauvre ... si pauvre qu'il devait partager un pantalon avec son frère aîné, de sorte que les deux ne pouvait pas sortir simultanément dans la rue ...C'est sans doute pour cela, que plus tard, il tenta de tirer profit financier de son talent échiquéen, ce qu'on lui reprocha souvent. En 1933, d'origine juive, il doit quitter l'Allemagne, le régime nazi confisque tous ses biens. Emanuel Lasker et sa femme Martha, dans leur vieillesse, se retrouvent soudain démunis, sans argent ni patrie. Emanuel est forcé de sortir de sa retraite et de jouer aux échecs à nouveau pour gagner suffisamment d'argent pour survivre.

Emanuel Lasker est né dans la province prussienne de Brandebourg dans une famille juive. Son père, Adolf Lasker, un chantre à la synagogue, dirigeait les prières liturgiques et les chants. Emanuel et son frère aîné Berthold sont envoyés à l'école à Berlin quand il n'a que onze ans. C'est Berthold, étudiant à la faculté de médecine, qui lui apprend à jouer. Lasker, alors, se faisait un peu d'argent en jouant aux Échecs dans les cafés locaux. Les parents d'Emanuel étaient tellement inquiet de le voir consacrer tant de temps aux Échecs et pas assez à son travail scolaire qu'ils demandent à Berthold de lui trouver une école. Ironie, le directeur de cette nouvelle école n'était autre que le président du club d'Échecs de la ville et le professeur de mathématiques était le champion d'Échecs local, dire que le jeune Lasker était dans son élément. Emanuel continua de montrer des talents remarquables à la fois pour les mathématiques et les Échecs.

Peu avant son match avec Steinitz en 1984, Lasker reçut comme prix d’une victoire contre un vieil amateur auquel il avait fait l’avantage d’une Dame, une boîte de cigares. Lorsqu’il revint à Londres après avoir battu Steinitz, le vieux monsieur vint le féliciter et lui demanda comment il avait trouvé les cigares. « Excellents ! répondit Lasker, car sans eux je n’aurais pas gagné ! Je suis ravi ; en effet je les ai tous fait fumer par Steinitz ! »

En 2011, Marc Lang effectue un nouveau record du monde à Sontheim, en affrontant à l’aveugle et simultanément, 46 adversaires (+25 =19 -2)

M

Frank James Marshall (1877 – 1944), joueur d'échecs américain fut l'un des plus forts joueurs de la première moitié du xxe siècle. Il était connu pour sa grande force tactique et également réputé pour ses arnaques, renversant une position perdue en tendant un piège ou en jouant un coup inattendu. Marshall définissait son style de jeu ainsi : "Je crois que je joue comme Jack Dempsey (le boxeur). Dès que le gong du premier round sonne, Dempsey commence à frapper son adversaire et ne le laisse pas reprendre conscience".

Durant le Tournoi d’Amsterdam de 1911, il affrontait Johannes Esser. AU 37e coup, Marshall allume un de ses légendaires cigares (aussi légendaires que ses cravates) et maladroitement fait tomber une tour. Un spectateur passionné la ramasse rapidement et la tend au Grand Maitre afin qu'il la repose sur l'échiquier. Mais Marshall l'arrête d'un geste de la main et grand seigneur dit : - Aucune importance, je n'ai pas besoin de ma Tour ! Sans doute un des sacrifices les plus curieux de l'histoire des Échecs.

Avec ses trois pions passés terrifiants, Marshall ne prenait sans doute pas un grand risque, mais l'anecdote de manque pas d'un panache que l'on aimerait retrouvé chez nos joueurs modernes !

 

N

Saviez-vous que notre empereur a laissé son nom à cette ouverture 1. e4 e5 2. Df3

Des malveillants disent, des Anglais surement, que cette ouverture serait une allusion désobligeante aux infidélités scandaleuses de Joséphine et de l'incapacité de notre petit grand homme de garder sa reine à la maison.

Najdorf

Reshevsky

Les Grands Maîtres Miguel Najdorf et Samuel Reshevsky, tous deux juifs d'origine polonaise disputèrent deux matchs en 1952 pour définir qui pouvait se proclamer Champion des Amériques (Amérique du Nord vs Amérique du Sud). Najdorf conte cette annecdote :

"Nous devions jouer dans trois pays, les Etats Unis, le Mexique et le salvador, dont le Président, grand amateur d'Échecs, avait partiellement financé le match. Quand nous jouâmes à New-York, peut-être parce que j'avais profité de la vie avec ecxès, je perdis les quatres premières parties. Quand un journaliste me demanda : - Que pensez-vous de Reshevsky? Que pouvais-je penser, moi qui avait perdue 4-0. Je me limitais à répondre : - C'est un joueur admirable! Un peu plus tard, on demanda a Reshevsky qui, comme la majorité des joueurs d'Échecs, était un peu vaniteux : - Qu'est-il arrivé à Najdorf pour perdre ainsi 4-0? - A Najdorf, il ne lui ai rien arrivé, repondit-il, il joue contre Reshevsky, c'est tout!

La seconde partie du match se jouait à Mexico et je gagnais trois parties concécutives. Le score revenait à 4-3. On demanda alors à Reshevsky : - Maître, que vous est-il arrivé? - L'altitude m'handicape, l'alimentation, etc... Ensuite on me demanda: - Qu'est-il arrivé au Grand Maître Reshevsky pour perdre d'une telle façon? Ma réponse fut : - A Reshevsky, il ne lui ai rien arrivé. Il joue comme Najdorf, c'est tout!

 

Nimzovitch Aaron

Maroczy Geza

Nimzovitch joue contre Maroczy. Ce dernier sort une cigarette sans l’allumer. Nimzovitch proteste et appelle l’arbitre, qui n’est autre que Vidmar, autre grand joueur d’Échecs. Vidmar lui fait remarquer que Maroczy ne fume pas. Et Nimzovitch de rétorquer : « En tant que Grand Maître, vous savez bien que la menace est plus forte que l’exécution ! »

P

Les pendules étaient mises en marche ou arrêtées en les basculant d'un côté ou de l'autre. À l’origine, les parties d’échecs se déroulaient sans limite de temps. Des joueurs prenaient un temps de réflexion excessif, soit parce que cela était conforme à leur tempérament, soit parce que face à une situation compromise, ils ne se résignaient ni à jouer, ni à abandonner. On raconte que Paul Morphy opposé à Louis Paulsen en 1858 fondit en larmes, exaspéré par le temps que prenait son adversaire. Les échecs furent le premier jeu dans lequel le recours systématique à la pendule s'est imposé à tous les niveaux de la compétition. Une première tentative consista à utiliser des sabliers, mais le décompte de temps se faisait pour chaque coup séparément, ce qui n’est pas pertinent eu égard au rythme de la partie. La pendule apparut lors du deuxième tournoi international de Londres, formule qui fut confirmée lors du match Adolf Anderssen contre Wilhelm Steinitz en 1866, puis lors du tournoi de Paris en 1876. C’est en 1894, au tournoi de Leipzig, que fut adoptée la double pendule avec couplage mécanique.

 Kovacevic

Au cours d'une compétition importante, Petrossian pris sa Dame pour exécuter un coup. S’apercevant alors que le coup était totalement perdant, il mis sa dame dans son café comme s'il s'agissait d'une distraction, demanda pardon à son rival et après l'avoir essuyé soigneusement, la reposa sur l'échiquier et continua la partie comme si rien n'était.

L'histoire des Échecs ne se préoccupe guère des compagnes de nos champions sinon pour s'en moquer comme pour la dernière épouse d'Alekhine, quelque peu enrobée et chargée d'ans, que l'on surnommait la veuve de Philidor. L'épouse de Tigran, Rona, semblait dotée d'un fort caractère. Toujours protectrice de son époux, le défendant avec bec et ongle, elle donna une gifle retentissante à Alexeï Suetin, l'entraîneur de son mari, quand ce dernier perdit contre Fischer au Tournoi des Candidats.

Une autre anecdote concernant cette brave épouse et montrant jusqu'où elle pouvait aller : Au Tournoi de Zagreb, en 1970, Fischer, despotique comme à l'accoutumée, domine. Madame Petrossian, agacée par les caprices de diva de notre Bobby, décide qu'il faut agir pour changer le panorama. Fischer disputait une partie contre Vlatko Kovacevic qui possédait l'initiative. Rona assistait au match depuis la salle de presses et entend des commentateurs que Kovacevic a un coup gagnant pour bouter Fischer hors de l'échiquier. Sans plus attendre, elle se dirige vers la salle de jeu, s'approche de Vlatko Kovacevic et lui glisse à l'oreille le coup victorieux, que ce dernier s'empresse de jouer, gagnant ainsi la partie. Les efforts de Maman Petrossian furent vains, car Bobby Fischer remporta le tournoi avec brio ! Voici la position au moment où Rona Petrossian apporte son secours quelque peu malhonnête au Yougoslave ravi de l'aubaine.

Fischer, Bobby - Kovacevic, Vlatko 30. ... Tf2 ! et Bobby est mort.

 

Cecil John Seddon Purdy, maître international australien (1906 -1979), fut le premier champion du monde officiel du jeu par correspondance. Durant le Championnat de 1953 (qui dura de 1950 à 1953), Cécyl envoya, d'une façon un peu routinière, un de ces coups par courrier. Mais revenant à la maison et jetant un œil à l'échiquier, il prend conscience que le coup envoyé le conduira irrémédiablement à la défaite.

La partie est d'importance, il doit agir vite. Il court à la boite aux lettres, tente de la fracturer. N'y arrivant pas, il gare sa voiture devant et monte la garde farouchement une partie de la journée et toute la nuit. Au matin, le postier vient faire son office. Cecyl tente d'expliquer la situation au postier ahuri, qui après bien des palabres et justificatif d'identité, accepte de lui redonner sa lettre. Cela fut peut-être décisif puisqu'il fut champion avec seulement un demi-point d'avantage sur le second !

Purdy mourut d'une crise cardiaque pendant un tournoi à Sydney en 1979. On rapporte que ses dernières paroles, adressées à son fils, furent « J'ai un gain, mais cela va prendre du temps. »

Cecyl Purdy, le joueur australien, quatre fois champion de son pays et aussi champion du monde par correspondance, remettait en jeu sa couronne pour la cinquième fois. S'il gagne la dernière ronde , ce sera chose faite.

Le hasard des appariements fait que son dernier adversaire n'est autre que John Spencer Purdy, son propre fils. Tout le monde imagine que le jeune s'effacera filialement devant le père, le laissant gagner. Mais après quelques coups, les spectateurs se rendent compte qu'il n'en est pas ainsi. La lutte père fils est sans merci et après un dur combat, le fils terrasse le père. À recevoir le coup de grâce, Cecyl quitte la table, le front perlant de sueur et dit : - Voilà ce qui arrive quand l'on apprend à ses enfants à jouer aux Échecs !

 

Arsovic Goran

 

La partie d’échecs la plus longue a duré 269 coups ! (Ivan Nikolic Vs Goran Arsovic, Belgrade 1989) et s’est terminée en partie nulle. Au bout de 102 coups, les deux belligérants ont jugé la finale « Tour + Fou contre Tour » comme étant nulle.

R

Nous connaissons tous les atrocités commises durant la Seconde Guerre mondiale et de nombreux joueurs juifs disparurent dans la folie du génocide nazi. Akiba Rubinstein était d'origine juive, mais à l'époque de la Grande Guerre s'était enfoncé peu à peu dans la psychose, ce qui lui sauva la vie. Sur la liste de la Gestapo, on vint un jour le chercher. La personne qui s'occupait de lui tente de convaincre l'officier que l'esprit de Rubinstein bat la campagne. Les nazis n’étaient pas intéressés par les déments, sans doute raffinement suprême et cruel, ils désiraient leurs proies lucides pour qu'elles aient la pleine conscience de la barbarie inhumaine qu'elles allaient vivre. L'officier s'approche d'Akiba et lui demande : - Vous êtes en état d'arrestation et vous serez emmené dans un camp de concentration. À l'étonnement du guestapiste, Akiba prend son chapeau vivement et répond : - Eh bien, allons, cela sera amusant ! Devant une telle réaction, les nazis s'en allèrent et le laissèrent en paix. Folie ou dernier gambit bien lucide de Rubinstein ?

Maximilien ROBESPIERRE avait pour habitude d'aller se distraire au fameux café de La Régence, à Paris. Un après-midi, il eut l'occasion de voir jouer un beau jeune homme, inconnu à ce bataillon échiquéen, qui battait tout le monde. Intrigué, Robespierre lui proposa une partie. Le jeune homme accepta mais précisa qu'il voulait un enjeu à cette partie. "Quel enjeu ? demanda Robespierre." "Vous le saurez à la fin de la partie ! rétorqua le beau jeune homme."

Robespierre perdit mais il s'empressa de demander quel était cet enjeu.

" Mon amour est condamné à la guillotine. Je vous demande de le faire libérer." Surpris mais beau joueur, Robespierre accepta.

Le beau jeune homme retira alors sa perruque, libérant une superbe chevelure. Ce beau jeune homme était une femme...

 

S

 

La notation algébrique fut inventée par le joueur Philippe Stamma, dit « le Syrien » (né à Alep vers 1705 - 1755), joueur d'échecs, et compositeur d'études d'échecs, qui l'introduit pour la première fois dans son ouvrage Le Noble Jeu des échecs (1745). Stamma était en Angleterre traducteur d'arabe. Champion officieux du « noble jeu », il se produisait à Londres au Slaughter's Coffee House dans St. Martin's Lane, l'équivalent anglais du Café de la Régence à Paris. La haute réputation de Stamma sera brisée lors de sa défaite devant Philidor, en 1747. Fixé à Londres en 1742, Stamma y perd sa suprématie en 1747, lors de sa rencontre avec "le grand Philidor" au café Slaughter. Rivaux sur l'échiquier, les deux hommes le sont aussi en écriture : si l'Analyse des Echecs de François-André Danican et Le Noble jeu d'échecs de Stamma sont publiés presque simultanément, l'ouvrage de Philidor ombrage celui du Syrien. Ce dernier reste cependant un maître dans l'art de la composition, qui consiste à disposer certaines pièces sur l'échiquier de manière à anticiper les coups qui suivent, ainsi qu'en témoignent les Cent positions désespérées contenues dans cet ouvrage.

Philippe Stamma séjourne à Paris en 1737. Il met à profit ce passage pour livrer dans ce premier manuel, Essai sur le jeu des échecs, où l'on donne quelques règles pour le bien jouer, & remporter l'avantage par des coups fins & subtils, que l'on peut appeler les secrets de ce jeu. - Paris : P. Émery, 1737. - In-12. [8 Y 4207 inv 7599 Rés] où il livre ses secrets de joueur émérite. Il y présente une centaine de finales avec diagrammes et propose un système de notation algébrique des coups universellement adopté depuis : la désignation des mouvements des pièces était jusqu'alors restée littéralement descriptive. Une planche dépliante et une explication en donnent le mode d'emploi. Le procédé, encore embryonnaire par rapport aux notations modernes, ne rencontre pas immédiatement le succès mérité - Philidor ne l'utilise pas -, mais cette nouveauté s'imposera au XIXe siècle et sera décisive dans le développement des études théoriques ultérieures.

Aujourd'hui c'est le système de notation reconnu par la FIDE et utilisé partout dans le monde. C'est donc un véritable langage international qui permet d'échanger facilement de nombreuses parties d'échecs avec un simple fichier texte. Une biographie de Stamma dans l'antique revue échiquéenne Le Palamède.

Wilhelm Steinitz avait la mauvaise habitude de cracher durant les parties autant pour gêner que déconcentrer ses adversaires, allant parfois jusqu'à cracher contre son adversaire. Durant le Tournoi de Paris de 1867, Joseph Henry Blackburne, gentleman très british, ne put supporter un tel affront et se fit justice en balançant le gros Steinitz par une fenêtre. Fort heureusement pour le fondateur des Échecs modernes, la salle de jeu était au premier étage et le rustre se sortit indemne de l'aventure.

Lorsque Spielmann perdait les parties, il avait l'habitude de sombrer dans un complet découragement. Cela lui arriva aussi à Carlsbad en 1923. Dans la troisièmement ronde, il battit Reti, mais il perdit la 4eme ronde contre Rubinstein et commença à tout perdre. Un soir, Reti le culpabilisa : "Mon vieux Spielmann, vous qui êtes l'un des plus grand joueurs d'attaque de tout les temps, je me sens presque enclin à me demander si c'était joli de votre part de m'avoir battu si brillamment à la troisième ronde pour ensuite si simplement faire cadeau de mes points à mes concurrents !'" Cela du émouvoir Spielmann qui assura "Bon, demain je vais gagner !", ce qui étonna beaucoup Reti "Mais vous jouer contre Alekhine !", "Cela ne fait rien", "Et vous avez les noir !", "D'autant mieux". Reti ne fut pas convaincu et pensa sincèrement que Spielmann allait se faire massacrer.

Voici la partie: Alexander Alekhine vs Rudolf Spielmann Karlsbad (1923) · Queen's Gambit Declined: Barmen Variation (D37) · 0-1

Les Noirs jouent 1...Ta2 et les Blancs abandonnent.

Oscar Shapiro détient le record du plus vieux joueur d’échecs à obtenir le titre de maître.

Ainsi, Shapiro est l’un des joueurs d’échecs ayant connu la carrière échiquéenne la plus longue. Né à Boston en 1909, il décède d’un cancer le premier janvier 2002 à 92 ans. Il n’aura jamais cessé de jouer. Fils d’un immigré russe, Shapiro développe rapidement une passion pour les échecs et la musique, il jouait du violon.

Oscar était l’un des rares encore vivants ayant affronté Emanuel Lasker lors d’une simultanée (un peu avant la mort de l’allemand en 41).

Yasser Seirawan est le premier américain à battre le champion du monde en titre qui dominait tout le monde : Il bat Anatoly Karpov en 1982.

T

En 1938, Tartakover participait au tournois de Lodz. A une ronde, il devait affronter une Maître polonais nommé Henryk Friedman (1903–1942). Friedman ne se présente pas au début de la ronde. Un quart d'heure plus tard, à la stupeur générale, il arrive complètement à poil dans la salle du tournois. Hilarité générale! Les organisateurs s'empressent de l'escamoter. Le tournoi reprend de manière plus sérieuse, mais vingt minutes plus tard, Friedman réapparaît dans la même tenu! Consternation des organisateurs. Et Tartakover de conclure laconiquement : "Si cela ce reproduit, j'exigerai la nullité, la même position s'étant présentée trois fois!"

Après le Tournoi de Zurich de 1959, brillamment remporté par Tal, ce dernier donna une autre preuve de son talent dans une simultanée rencontrant trente-huit joueurs. La simultanée terminée, s'approche un adversaire qui a réussi à vaincre Tal, souhaitant commenter quelques aspects de la partie. Ce fut, alors, ce curieux dialogue :

— Je crois que j'avais un meilleur choix au 17e coup, dit Tal. — Ne me dites pas, s'étonne son rival, que vous vous souvenez de toutes les parties ? — Je me rappelle de toutes les parties ! confirme Tal avec tranquillité.

Toutes les personnes présentes pensent à une fanfaronnade de Mikhail Tal et ne veulent pas le croire. Mais Tal insiste et fait le pari. Misha prend un crayon et du papier et inscrit chacune des 38 parties jouées sans même l'aide d'un échiquier. Sans aucun doute, un esprit merveilleux !

À cette question de Damsky : - Pendant une partie vous vient-il à l'esprit des idées qui n'ont rien à voir avec les échecs ? Mikhail Tal répondit : - Continuellement. Jamais je n'oublierai pour citer un exemple, ma rencontre avec le Maître Eugène Vasiukov (Kiev 1964), durant un des Championnats d'URSS. La position sur l'échiquier était peu claire et je songeais à sacrifier un Cavalier. Il n'y avait pas de variante évidente, car il existait de nombreuses possibilités. Je commençais à calculer, terrifié par l'idée que le sacrifice pouvait être faux. Les idées s'entassaient dans ma tête, passant d'une variante à l'autre, trouvant toujours une réfutation correcte pour mon adversaire. Dans mon esprit se forma une masse chaotique de coups, parfois même sans aucun rapport les uns aux autres, et l'arbre d'analyse recommandé par les entraîneurs commença à croître monstrueusement. Je ne sais pas pourquoi, mais à ce moment, je me suis souvenu de la célèbre comptine de Tchoukovski:

Ô, combien est difficile la besogne de sortir du marais l'hippopotame!

Je ne saurais expliquer par quelle association cet hippopotame se retrouva sur l'échiquier, mais la vérité est que, tandis que les spectateurs croyaient que j'analysais la position, je pensais comment diable je pourrais tirer ce foutu hippopotame de son marécage. Je me souviens que dans ma tête s'empilaient treuils, leviers, hélicoptères et même une échelle de corde. Après de nombreuses tentatives je ne trouvais aucune méthode acceptable pour le sortir de sa fâcheuse position, et je pensais avec amertume: « Eh bien qu'il se noie ! ».

En 1966 eurent lieu à La Havane les Olympiades et les joueurs et leurs délégations reçurent un bon accueil du gouvernement de Fidèle Castro. L'équipe soviétique fut invitée un soir à la représentation du cabaret Tropicana. La soirée se déroula tranquillement jusqu'au moment où Tal repéra une jolie dame et commença à la lutiner. Malheureusement pour Mikhail, le compagnon de la beauté cubaine, latin jaloux au sang chaud, lui fracasse une bouteille sur le crâne sans un mot ni autre forme de procès. On dut emmener d'urgence le pauvre Tal à l'hôpital, où sa profonde blessure fut suturée. Le jour suivant, à la une du journal Destino, on pouvait lire : « 11 points sans jouer une seule partie ! » Les résultats de Mihail à cette Olympiade resteront mémorables : 20 points en 13 parties dont 11 de sutures.

Un Grand Maître vient trouver Tal et lui demande : – Je passe aujourd’hui à la télévision, Que puis-je bien dire aux téléspectateurs? » – Qu’ils écoutent la radio, c’est moi, demain qui y passe!